Douce surprise

Le temps semble passer au ralentie lorsqu'on attend juste qu'il passe, que le soleil fasse sa course dans le ciel azure, parfois caché par de rares nuages... Juste pour arriver comme je suis partie.

Les brins d'herbes s'agitent sous les mouvements de l'air, tous animés du même va-et-viens, oscillant de droite à gauche sans aucune synchronisation. Il y a en de toutes les tailles, petits, fins, grands, larges, dressés comme des i ou se courbant sous leur propre poids, une masse verte multiforme et indivisible. De temps en temps une bourrasque plus forte vient éveiller leur mouvement, plus rarement ils deviennent totalement immobiles et le temps semble alors s'être complètement arrêter, parfois encore c'est ma main qui leur impose : Du bout des doigts j'effleure leur sommet, caresse ces herbacées pour apprécier leur douceur, leur donner un nouveau mouvement ou observer comment ils reprennent le leur. J'observe la population qui les habite, tous ces insectes qui y grouillent, comme ce papillon posé sur une feuille et qui s'ouvre pour nous laisser découvrir ses teintes... Aujourd'hui il sera simplement aux couleurs des feuilles mortes, à l'intérieur comme à l'extérieur. Les abeilles passent de fleurs en fleurs... Ces minuscules fleurs qu'on distingue à peine vue de tout notre être. J'en cueille une orangée, petite et délicate, simplement belle. Les brins vibrent toujours sous mes yeux, vert sombre du côté ombragé, vert clair légèrement jaune du coté ensoleillé. Et je suis la course du temps sans fixer le brûlant astre du jour, juste en suivant la marche des ombres et la variation des teintes... A cet instant, tout devient bleuté, le soleil disparaît derrière les feuillages, bientôt et enfin la nuit.


Je suis arrivée tôt ce matin, bien avant que le soleil ne fasse son apparition, au même endroit où je l'avais laissé. Espérant l'y trouver et être là à son réveil, comme si le cours du temps avait été suspendu et que je ne l'avais jamais quitté. J'ai passé la journée assise ou allongée à dorer au soleil, à regarder le vent jouer avec l'herbe, à observer ce monde en miniature. Maintenant le soleil est passé sous l'horizon, le noir envahit le ciel, terrassant ses dernières lueurs et les premières étoiles apparaissent. Quant à lune, elle est déjà là, donnant tous ses éclats argentés à ma robe... Une robe encore plus blanche que ma peau, brodée de fil d'argent et parsemée de quelques pierres et perles, un ruban brodé la resserre juste sous ma poitrine, d'où le tissu volage et léger tombe librement jusqu'à mes pieds. Deux bandes de tissu gris et sans apparat le quittent également pour contourner mes épaules en s'amincissant et le retrouver sous mes omoplates... Laissant voler le tissus adroitement selon les mouvements de l'air et mon propre mouvement, je quitte les lieux... Il est temps de partir le rejoindre.

[...]

L'arcade effondrée apparait sous mes yeux, toujours avec la même appréhension et la même admiration pour ce grandiose édifice suranné par le temps mais toujours debout, le temple, notre refuge
De couloir en couloir, de salle en salle, au centre d'une des nombreuses cours intérieurs, un endroit qui est devenu « notre chambrée » : Un toit soutenu par quelques colonnes entre lesquelles nous avons disposé de larges bandes de tissus aux couleurs pastels assorties aux tons orangés des pierres, pour plus d'intimité. La matière est légère et flotte allègrement dans le vent. Ecartant le tissu d'une main, je m'ouvre un chemin au cœur des nombreuses couches de voiles, mon cœur bât un peu plus à chaque fois que j'écarte un feuillet, espérant le trouver derrière, jusqu'à ce qu'enfin je pénètre dans la petite pièce... Au centre un lit très simple, une petite table devant... Et lui...
Je souris en le voyant, endormi et emmêlé dans les draps... Je m'approche doucement, à pas feutré, me faisant aussi légère qu'un courant d'air... Je dépose la petite fleur sur la table basse, et je monte sur le lit, avançant jusqu'à lui à quatre pattes pour m'allonger à ses côtés. Je me glisse dans ses bras, la tête posée sur son épaule, passant son bras autour de ma taille, laissant ma chevelure noire dégouliner derrière moi.
En prenant soin de ne pas le réveiller, j'effleure du bout des doigts l'arrête de son nez, mon index glisse sur ses lèvres puis son menton, traçant une ligne dans la continuité du nez avant de laisser ma main retomber sur son épaule, opposée à celle qui soutient mon visage. Je regarde ses lèvres, lascives et moi captive, si pressée qu'elles retrouvent le contact avec les miennes... Je voudrais les embrasser, tendrement, amoureusement, fougueusement, mais je ne veux surtout pas le réveiller, je désire juste qu'il s'éveille de lui-même et me trouve à ses côtés, telle une douce surprise.
Ma main joue toujours avec sa peau, dessinant des lettres sur sa poitrine, des mots en elfique pendant que ma jambes s'emmêlent avec les siennes et les draps..
Je suis si bien tout contre lui, si bien que je n'arrive pas à simplement le regarder dormir... Malgré moi, le sommeil m'emporte... Profond mais agité.